Facteurs/Noteurs

L’orgue de barbarie : un coup de foudre !

C’est toute petite, alors que nous vivions à Paris, dans le quartier des Halles que je suis tombée amoureuse de l’orgue de barbarie, en allant voir les chanteurs de rue en famille. C’est aussi à noël, devant les vitrines animées par les automates des Galeries Lafayette que la magie de la mécanique s’est emparée de moi. Et puis je suis tombée sur un disque de Annie et Arthus, des copains de mes parents qui tournaient la manivelle d’un orgue de barbarie Thibouville… Alors là, quelque chose s’est réveillé en moi…
C’est ça que je veux faire !

Rencontre avec les facteurs d’orgues

Frédéric Godin, facteur d’orgues de barbarie, dans son atelier à Mesquer

Alors le voyage a commencé.
J’ai été à la rencontre de tourneurs, de chanteurs de rue qui m’ont fait partager leur passion. En 2001, l’un d’eux, Patrice Bonnevie, m’a donné rendez-vous à Fals, près d’Agen, chez Sébastian Schuetz, un facteur d’orgues de barbarie. Ce dernier m’a fabriqué mon premier orgue, un instrument à anches en laiton 27 notes avec transpositeur, Baptisé Raoul. Avec Raoul, j’ai fait mes premiers pas de chanteuse de rue. C’est avec lui qu’en 2002, non sans fierté, j’ai gagné la palme d’or des chanteurs de rue de Quintin. Avec devinez qui dans le public ?… Arthus….
La boucle était bouclée.

Après quelques années avec Raoul, j’ai eu envie de me produire avec un orgue à flûtes. C’est beau et ça envoie !
Un nouveau chapitre s’est écrit. C’est Hugues Charbonneau, un compagnon de route, qui a adopté Raoul. Mon premier orgue de barbarie coule toujours des jours heureux avec Hugues, l’âme de la Péniche Spectacles de Rennes.
En 2008, alors que j’attends mon premier garçon, Manoé, mon deuxième orgue de barbarie est aussi en gestation. Pendant ce temps-là, Sébastian Schuetz s’est associé avec un autre facteur d’orgue de barbarie, Frédéric Godin. Fred a son atelier à Mesquer, à une heure de chez moi. Une histoire d’amitié et une nouvelle collaboration sont nées !
Ce deuxième orgue, tout comme le premier, a été peint par Alain Mille. Ses oiseaux aux couleurs chatoyantes chantent encore…
Mon comparse jaune et rouge m’a suivi jusqu’en 2013. Ce sont des gens du Nord, Les Ch’tits baladins, qui l’ont adopté pour leur association. Les oiseaux ont migré et les chansons continuent de voyager avec eux…

Car entre temps, Frédéric Godin et Sébastian Schuetz ont développé un orgue de barbarie prototype, un modèle hybride, dont la lecture marche aussi bien avec des cartons perforés qu’en MIDI. Une nouvelle ère semble s’ouvrir pour la musique mécanique, offrant la possibilité de jouer de nouveaux répertoires qui ne sont pas chez les noteurs et surtout de présenter des compositions. Commence alors une nouvelle aventure avec le troisième orgue et le spectacle Chansons pour Barbaryton avec Ronan Le Gouriérec. Mais la technique a ses limites, la patience aussi !… Ce système n’est pas encore très au point et rien ne remplace la magie des cartons perforés ! Retour à l’atelier en 2018.

Zébulon, le quatrième, est une réplique du second, un orgue 29 flûtes avec transpositeur et 2 registres. Il a été décoré par Christine Alibrant, d’après une proposition graphique d’Alex Aubert. Zébulon, je ne compte pas m’en séparer ! Et c’est avec lui que vous aurez l’occasion de venir m’écouter chanter dans les années à venir ! Il est mignon, non ?

Christine Alibrant (peinture) et Alex Aubert (conception graphique)

Rencontre avec les noteurs

Les noteurs sont ces magiciens qui fabriquent des cartons perforés pour orgues de barbarie. Ce sont avant tout des musiciens, qui travaillent l’arrangement d’un carton en fonction des contraintes liées au format (pour orgue 27 notes par exemple), sur un logiciel de musique assistée par ordinateur. Ils pilotent ce logiciel via un clavier maître et perforent ensuite les cartons.

Pierre Charial - cartons - Morwenna - orgue de barbarie

Le premier noteur chez qui je suis allée, est celui qui a relancé ce métier en France fin des années 70, Pierre Charial. Il avait alors son atelier rue Léon Frot, un endroit plein de poésie dans le XIème arrondissement de Paris. C’est chez lui que j’ai acheté mes premiers cartons, « Les classiques ». Pierre a toujours un atelier dans le Sud de la France et donne aussi des concerts jazz ou de musique contemporaine.

Antoine Bitran - cartons - Morwenna - orgue de barbarie

J’ai ensuite fait la connaissance d’Antoine Bitran qui avait son atelier dans le XIXème. Tout comme pour Pierre, j’ai aimé ses arrangements, sa patte swing et son amour pour les morceaux rock qu’il a adaptés à l’orgue de barbarie.

Ma route a aussi croisé celle de deux musiciens plein de fantaisie, Patrick et son fils Jonathan Mathis. Les musiciens ont monté « cartons Mathis ». Ils ont repris les cartons du facteur d’orgues Didier Bougon et proposent aussi leurs arrangements. Vous pouvez aussi envoyer vos fichiers midi pour qu’ils percent vos compositions.

C’est d’ailleurs, dans cet esprit que je travaille aujourd’hui avec Jean-Marc Puigserver, alias Barbarissimo, un excellent accordéoniste, qui connaît bien la chanson et les chanteurs de rue. Il me perce aujourd’hui mes compos, qu’il arrange avec beaucoup de goût aux contraintes de l’instrument. Il propose aussi des chansons qui sortent des sentiers battus et dépoussière le répertoire. Je suis enchantée de cette collaboration. Jean-Marc a été formé par Pierre Charial, maître d’arts, qui lui a transmis son savoir-faire. On le voit ici avec Riton La Manivelle.